003 - Erwan&Penny - City of stars

énéralement lorsque tu vas récupérer ton courrier, tu distingues très vite ceux qui concernent les soirées pompantes et mondaines, celle que tes parents affectionnent plus particulièrement... Celle qui te répugne majoritairement. La poubelle sélective étant juste à côté, tu n'y jettes même pas un bref coup d'oeil et les glissent à l'intérieur. Mais depuis ta rencontre avec Erwan, on peut dire que cela a changé la donne. Tu ne saurais l'expliquer, tu ne pourrais donner une raison valable et potable... Mais tu prends quelques minutes, chaque matin pour farfouiller, trouver la bonne excuse pour y aller alors que cela t'hérisse le poil rien que d'y penser. Tu te demandes vraiment pourquoi cet homme t'intéresses autant ?! Il est marié. Bon, il a l'air d'être très perturbé sentimentalement... est-ce pour cette raison qu'il t'attire ? Ne désirant pas y passer plus de quelques minutes, tu préfères feuilleter le tout en toute tranquillité dans ton appartement. Tu remontes les escaliers et pénètres dans ton logis. T'installes au comptoir et regardes les différentes propositions qui peuvent s'offrir à toi. Une te tape dans l'oeil. Alors que tu te relèves pour te faire couler un café, tu la prends dans l'autre main et prends connaissance de la cause de ce nouvel événement. Une rentrée Littéraire. Erwan Nelson étant un éditeur... Il y a de fortes chances que tu le croises là-bas. Tu prends une gorgée de ton café, t'adosses contre un meuble de la cuisine et réfléchis à la situation. Si tu en parles à tes parents, tu sens les ennuis arriver... Dans le même cas si tu n'annonces pas ta venu tu risque d'en prendre pour ton grade. Ta soeur et ton frère risque d'y être. Est-ce véritablement un risque à prendre alors que pour le moment, tu as juste envie de t'amuser? Erwan bien que troublant, est-il une bonne raison pour que tu participes de nouveau à ce grand jeu qui s'appelle la mondanité ?

Apparemment oui. Tu as appelé pour confirmer de ta venu. Ce qui a réveillé ton entourage. Tu n'as pas eu dix minutes à toi pour réaliser ce que tu venais de faire, que ta mère t'appelais déjà pour te remercier de faire un effort. Qu'elle t'avais préparé un lot de costumes et que tu devais les essayer dans l'après-midi. On peut dire que tu avais des regrets, que tu détestes toujours autant qu'on prenne soin de toi, qu'on te manipule pour que la pilule passe niquel. Tu ne comptes pas te laisser faire ce soir... bien que sache pertinemment qu'il va falloir que tu fasses des compromis pour ne pas faire de vagues. Tu vas te préparer et file par la suite à ta réunion avant de rejoindre les quartiers chics, destination : Le magasin de fringues. Il te faut bien deux heures pour prendre une décision, choisir ton costard cravate et lorsque tu files en direction de la soirée... Il ne rigole au vu de l'endroit : Le château Mormont. La maison d'édition d'Erwan n'a pas à s'inquiéter... en tout cas c'est ce que tu te fais comme réflexion. Tu vas pour y pénétrer lorsque tu entends ta mère t'appeler. Tu souris gêné. Elle te prends dans ses bras. Tu es perturbé par cette étreinte, mais ne le fais pas paraître. Elle passe un coup de main dans ta coiffure. "Maman, je ne suis plus un enfant..." "Je sais... Lorsque tu étais gamine c'est plutôt un peigne dans ta tignasse." Ton sourire est d'autant plus gêné. "Ah oui... on en parle là devant tout le monde!" "Quoi? Je n'ai plus le droit de rien dire. Comme ton père." dis-t-elle avant de pénétrer dans l'enceinte du château. Après la surprise, l'agacement. être comparé à son père avant une soirée mondaine... Tu ne pensais pas que c'était possible... mais ce milieu à le don de faire perdre la tête. Tu la suis quelques minutes après, récupère une coupe de champagne et aperçoit au loin Erwan Cent. Un sourire s'esquisse sur ton visage. Tu interpelles alors un ami de votre famille, étonné de te voir et commence à discuter d'un sujet totalement bateau. Avec en ligne de mire - toujours - Erwan.

Erwan en avait bavé pour organiser cette soirée pour la rentrée littéraire au Château Mormont. Il avait fallu trier sur le volet les invités, envoyer les fameuses invitations, sésames pour y entrer, appeler les traiteurs, gérer les arrivages de boissons, les serveurs... D’habitude, c’était le service évènementiel qui était en charge, mais il avait fallu les aider car la responsable du service était partie en catastrophe en congé maladie. Quelque chose qui n’était pas au niveau d’une grippe, plutôt du style à rester à l’hôpital... Il ne voulait pas les détails, il bouillonnait.

Il avait donc dû se lever aux aurores, pendant trois jours, et avait travaillé non-stop depuis son repas avec Brooke. Il n’avait même pas eu le temps d’envoyer le fameux SMS prévu, toujours en brouillon dans son téléphone portable. Patrick Nelson, le patriarche, avait même poussé le sadisme à organiser une répétition des discours à prononcer devant tous les invités chaque soir de ces temps de préparatifs. Il en devenait presque méchant avec ses subordonnés, qui ne l’avaient jamais vu ainsi.

Une fois la soirée entamée, les premiers invités arrivés, il avait même dû faire venir une maquilleuse qui avait caché sous des artifices sa sale tête qui n’aurait vraiment pas fait bon genre devant les grands auteurs, le conseil d’administration et autres grosses têtes invitées. Puis, il s’était souvenu que Sydney avait refusé de le gratifier de sa présence. Rien que cela le mit soudainement en joie.

Une fois les invités accueillis, il tourna légèrement la tête et faillit vaciller... Penny était là. Penny. Etait. Là. Par tous les saints, les Dieux, les Diables et autres créatures. Nous serons amenés à vite nous revoir... En effet, mais il n’imaginait pas le croiser ici ! De plus, il était attendrissant, à être chouchouté ainsi par sa mère. Erwan ne l’avait jamais vraiment été, juste le minimum lorsqu’il était enfant, puis encore moins que ça quand il avait grandi. Mais lorsqu’il voulut le rejoindre pour le saluer, son père lui fit un signe, lui rappelant qu’il avait un discours à prononcer.

La mort dans l’âme, il se dirigea vers la tribune et s’installa tandis que la foule s’amassait à ses côtés afin d’écouter religieusement.

« Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, bonsoir, et merci d’être venu à cette soirée de la rentrée littéraire de Cent Fathers and Sons ! ... »

Tandis qu’il prononçait son discours, Erwan se rendit compte qu’il était heureux qu’il ait autant travaillé son discours avec son père. Car il le connaissait finalement par cœur et pouvait ainsi observer Penny tout son saoul. Il était habillé de façon très classe... Cela le changeait énormément de ses vêtements lorsqu’ils s’étaient rencontrés au Café Français, une éternité plus tôt. Il était plus... Comment le qualifier ? Il était séduisant, viril, distingué, imposant.

« ... Vous aurez l’occasion de discuter entre vous et, je l’espère, nous concocter de magnifiques œuvres pour la prochaine rentrée littéraire, qui sera aussi excellente que celle de cette année ! Je vous remercie. »

A la fin de son discours, Erwan avait la gorge sèche ainsi que le cœur en panique. Il n’avait qu’une envie, garder l’œil sur Penny, prendre de quoi se désaltérer et fendre la foule jusqu’à lui. Cependant, les applaudissements trainèrent en longueur – il ne pouvait pas partir avant qu’ils ne se soient arrêtés par correction – et plusieurs personnes décidèrent subitement que c’était le moment parfait pour l’aborder. Administrateurs ravis, auteurs amateurs en quête de contrat – comment diable sont-ils entrés ici ?! – et même simples admirateurs de son discours.

* N’en faites pas tant, vous et moi savons parfaitement que je n’ai pas écrit un mot de ce discours. *

Il s’écoula plusieurs minutes, plus dizaines de minutes, même une heure, avant que finalement, son trajet arrive aux côtés de Penny, ou plus précisément dans son dos. Il prit quelques secondes pour boire une gorgée dans la flûte de champagne – qui avait fini dans sa main on ne savait pas trop comment... Cela lui donnerait du courage. Ensuite, il toussa pour attirer l’attention de Penny.

« J’ignorais que nous nous reverrions effectivement de sitôt... Une agréable surprise, Monsieur Redmayne. »

Erwan avait un petit sourire. En réalité, il avait envie de sourire de toutes ses dents mais il se contenait, afin de ne pas passer pour un fou – déjà fait, vous direz... Il était tellement content de le revoir, mais il manquait vraiment d’assurance et craignait vraiment que seul le hasard faisait que l’objet de ses obsessions soit là ce soir.

« J’espère que vous appréciez la soirée ? »

Tu te rappelles pourquoi tu n'as jamais apprécié ce genre de soirée. Ce n'est pas parce que tu n'aimais pas jouer les faux-semblants, car à une époque tu appréciais jouer un rôle. Parfois ça facilite la vie, d'agir différemment, au contraire de notre personnalité. Prendre des vacances de notre personne. Se vider la tête et s'amuser dans un certain sens. Le problème avec ce petit jeu? C'est qu'on y prend goût à force et qu'un vide se fait ressentir. On perd notre identité au détriment d''un jeu grandeur nature et lorsqu'on se rend compte deux choix s'offre à nous. Se laisser aller ou dire non. Tu t'es retrouvé dans cette situation et quand tu t'y es confronté... tu as préféré tracer ta route. Suivre ton propre chemin et reprendre les rennes. Aujourd'hui tu te retrouves dans ce genre de spectacle vivant et tu remarques que tu es plutôt fier de toi et de ce que tu es devenu. Certes avec ta famille rien n'est au beau fixe, mais tu ne peux renoncer à ce passé qui t'as tant touché, marqué... Un passif qui aujourd'hui, ce soir te fais sourire et alors que tu n'écoutes qu'à moitié ton interlocuteur tu croises son regard et lui dit: "Vous savez quoi Dan... ça vous dit qu'on trinque?" "Je vous demande pardon?" demande-t-il éberlué. "On va trinquer! A cette soirée qui s'annonce très bonne et à la vie!" "Je ne sais quoi dire... je ... je ..." Vos verres se rencontrent puis la foule perd en volume sonore. Ton attention est attirée, tu te retrouve captivé par la personne qui vient d'apparaître sur scène. "Chut... ça commence!" dis-tu avant d'esquisser un petit sourire malicieux. Tu prends une gorgée de ton champagne et écoute attentivement le discours d'Erwan Nelson.

Il termine sa tirade et tu lance le premier les applaudissements, tu es suivi par d'autres personnes, puis la foule l'accapare. Tu trouves ça amusant, remarque le changement de comportement. Le frêle et fragile Erwan n'est plus, il a laissé place à sa couverture. Ce sourire enjôleur lui va bien... toutefois. Tu préfères rester à l'écart pour le moment, tu n'es pas du genre groupie. Tu te faufiles à travers les personnes pour te trouver un petit coin tranquille pour observer. Une position qui te vas bien. Après avoir trouvé le coin idéal tu attends. Un je ne sais quoi qui pourrais arriver. Une discussion qui pourrais possiblement ne pas se réaliser. Tes attentes ne sont pas vaines - une heure après - tu entends cette voix derrière ton dos que tu devines immédiatement. Tu te retournes et te retrouve face à Erwan, toujours avec ce sourire... quoi qu'il a chose en plus... Tu y décèles une certaine sincérité. "Je suis de ce genre là... à surprendre!" dis-tu ton sourire malicieux retrouvé. "Oh non." dis-tu très honnêtement. "Je m'ennuie profondément. En réalité si je suis venu c'est pour une certaine personne." dis-tu subtilement. Car tu es aussi de ce genre à placer du suspense. A ne pas trop en dire, à faire languir... Depuis Quincy c'est préférable de jouer à ce jeu.

"Je suis de ce genre là... à surprendre!
_J’en conviens aisément."

Erwan se sentait comme une petite puce excitée. Le sourire malicieux de Penny lui donnait l’impression de revivre. Effectivement, il était surprenant. Cet homme était le pic qui relevait son électrocardiogramme plat.

"Oh non. Je m'ennuie profondément. En réalité si je suis venu c'est pour une certaine personne. »

A ce niveau-là, ce n’était même plus un pic, c’était une cordillère. Erwan tenta de ne rien laisser transparaître de son espoir, mais c’était probablement peine perdue. Il devenait mauvais à ce jeu alors qu’il avait été parfait durant toutes ces années. Hé bien, s’il est venu pour une certaine personne... Autant supposer que c’était pour Erwan ? Au pire, que pouvait-il lui arriver ? Être ridicule ? Déjà fait. Être déçu, un peu triste, ça c’était aussi déjà fait. Sans doute Erwan minimisait-il les choses, mais à ce stade là des choses, c’était de la survie.

Cependant, il retint que Penny n’était pas à son aise à la soirée, qu’il s’ennuyait même. Il ne pouvait pas lui en vouloir, après tout, c’était une soirée mondaine littéraire. Personne ne devait réellement s’amuser. Ou si peu. Mais Erwan eut une idée... Il se sentait pousser les ailes et avait envie de le surprendre à son tour. Alors, il attrapa le petit talkie-walkie qui lui permettait de contacter la sécurité et parla dedans en faisant signe à Penny d’attendre et en se tournant.

« Sécurité, ici Erwan Cent. Savez-vous où se trouve actuellement Patrick Cent ? »

Il y eut un grésillement, puis une réponse lapidaire digne du service de sécurité tel qu’Erwan le connaissait. Son père se trouvait actuellement au beau milieu de la salle de réception, caché par la foule qui s’amassait. Cela signifiait qu’il paradait. Il n’allait certainement pas bouger de là avant que tous les invités soient partis. Donc, Erwan avait le champ libre. Après tout, il avait fait acte de présence, il avait discuté avec certaines personnes importantes et prononcé son discours. Alors, il décida, pour la première fois, de se surprendre lui-même.

« Alors, si monsieur Redmayne veut bien me suivre... »

Et sans prévenir, il décida de prendre la main de Penny et de le tirer brusquement en direction d’une porte dérobée située derrière le bar-buffet. Il l’emmenait en réalité dans la cour intérieure du Château Mormont, où les invités ne pouvaient pas aller. En général, cette cour servait à stocker des œuvres d’art lors de ventes artistiques. C’était un petit bout de jardin secret, entretenu par le propriétaire des lieux.

« Voilà un petit coin qu’on ne voit pas pendant les réceptions. Je me cache ici parfois, quand j’en ai assez des figures empesées. »

Erwan avait un peu perdu de son air confiant, de son masque de la vie professionnelle. Mais il était néanmoins détendu. Il se sentait bien avec Penny, il ne savait pas pourquoi. Il devrait être mort de honte, mais au contraire, il ne se sentait pas jugé. Il avait apprécié la façon de l’homme de le respecter, de héler un taxi pour lui. De lui donner son numéro de téléphone. Alors, Erwan tenait à le remercier.

« Je suis désolé de ne pas avoir utilisé votre numéro. Je suis presque honteux d’avoir fini dans un tel état. Mais merci beaucoup. Je sais que ça va paraître bizarre, mais j’avais passé une bonne soirée en votre compagnie – pour ce qu’elle a duré. »

Erwan fit un sourire resplendissant à Penny. Ensuite, il fut pris d’une pulsion soudaine : il se jeta sur l’herbe, allongé sur le dos, les yeux vers le ciel. On voyait des étoiles, tenues à cause des lumières du château et de la ville, mais bien là. Il se sentait d’humeur presque poétique. Il se faisait complètement tremper par l’eau de la pluie retenue par l’herbe mais il s’en moquait. Parfois, il aimait ces instants de rebellion. Ce devait être ridicule aux yeux de Penny mais c’était pour lui de grands moments.

« D’ailleurs, ça vous va très bien, le costume de soirée. »

A une période tu aurais menti. Où du moins tu aurais trouvé les mots pour être subtil. Tu n'aurais pas été aussi franc dans ta réponse et n'aurait pas énoncé de bout en blanc que tu te fais chier. Mais tu as grandi. Tu n'es plus une jeune fille, tu es un grand garçon. Un homme. Qui a beau être effrayé par des situations intérieurement, démontre une force incommensurable et parfois détonante à l'extérieur. C'est comme cela que tu fonctionnes et on aura beau dire que c'est certainement dû à un certain vécu, tu te dis qu'il faut arrêter de se plaindre pour un rien. Tu peux comprendre ceux qui le font, mais tu as revu à la baisse ton sens du malheur. Tu ne diras jamais que le tien rentre dans le top 10. Tu n'oserais jamais dire ça car chaque émotion est unique. Chaque sentiment, chaque événement sera pris d'une manière que tu pourrais comprendre ou non. A toi de voir si tu veux juger une personne de par sa douleur ou de par son âme qui te demande finalement juste un peu d'aide.. un peu de compassion. Et si cette personne est foncièrement mauvaise... c'est qu'elle ne sens pas prête d'aider... Mais parfois tu as beau ressentir ça... tu as beau avoir cette sagesse ou bien encore cette réflexion en toi... il t'arrives de réagir de manière puéril, parce que l'être humain fonctionne de cette manière et qu'il a parfois du mal à mettre sa fierté de côté... Avec Erwan il n'est pas question de cela. Tu sais que pour le moment tu joue avec lui, mais c'est parce que ton coeur n'est pas encore prêt de se relancer. Il n'est pas prêt de refaire un tour sur les montagnes russes... pourtant tu es là... Parce que le regard qu'il porte sur toi te semble légèrement familier. Parce qu'égoïstement ce regard tu l'as déjà ressenti sur toi... et que.. même s'il est certain que les yeux d'Erwan ne ressemblent en aucun cas à celui de ton beau Quincy. Il a ce même désir. Arrive à combler un certain manque... une petite part du moins. Tu l'écoutes parler à son talkie. N'a pas vraiment le temps de tout comprendre avant qu'Erwan n'attrape ta main. Une certaine gêne se fait ressentir. Ça te perturbe plus qu'autre chose. C'est un rapprochement que tu n'avais pas pris en compte et tu as ce drôle de sentiment de trahir ton homme. Alors tu es soulagé lorsqu'il détache cette étreinte. Tu préfères rester silencieux et écouter l'éditeur plutôt que de te braquer.

"Vous êtes vraiment le gosse de riche le plus typique que je n'ai jamais vu! " dis-tu avec une certaine ironie. Mais redoutant la réaction d'Erwan, serais-tu inquiet? Tu rectifies : "Ce n'est pas vraiment un défaut... c'est juste... que je devine que ça ne doit pas être facile... en fait... pour être tout à fait franc... vous me faites penser à moi... lorsque j'étais gamin... gamine!" dis-tu honnêtement. Il s'allonge sur l'herbe ce qui te fais sourire. Une véritable âme d'enfant. Il te complimente sur ta tenue. Tu y jettes un bref coup d'oeil avant de t'asseoir à ses côtés. "Je l'ai acheté aujourd'hui... Mais j'y ai rajouté ma petite touche." dis-tu en retirant de ta poche intérieur deux médailles accrochés l'une à l'autre. Tu le lui montres avant de les remettre dans ta poche. "C'est important pour moi de les avoir sur moi... quoi qu'il arrive!" Tu ne donnes pas plus de précision. Parce que cela n'a jamais été ton fort de parler de là-bas. De parler de Quincy."Le costume vous va à ravir aussi! Votre femme ne sait pas ce qu'elle rate!" rajoute-tu en essayant de faire de l'humour. En feintant comme toujours!

« Vous êtes vraiment le gosse de riche le plus typique que je n'ai jamais vu! »

Erwan eut d’abord la surprise de l’entendre dire cela. Il n’avait jamais eu l’impression d’être un gosse de riche. Enfin, le plus typique des gosses de riches. Il disait toujours qu’il aurait préféré naître à South L.A. mais finalement, il était là, fils d’un riche éditeur, prêt à tout pour prendre sa suite. Peut-être était-ce hypocrite de sa part. Cependant, il reconnaissait bien là le franc-parler de Penny. Pas vraiment du genre à prendre des pincettes.

« Ce n'est pas vraiment un défaut... c'est juste... que je devine que ça ne doit pas être facile... en fait... pour être tout à fait franc... vous me faites penser à moi... lorsque j'étais gamin... gamine! »

Juste au moment où Erwan se disait qu’il reconnaissait le franc-parler... Voilà qu’il se mettait à balbutier comme une débutante à son premier bal. Il était donc d’abord vraiment surpris. Il s’inquiétait donc de comment il allait recevoir la critique qui finalement n’en était pas une. Erwan eut envie de rire. Des souvenirs revenaient à la surface, après que Penny lui ait rappelé qu’il était une « gamine », auparavant. En effet, il se souvenait de cette jeune fille de 3 ans son aînée qu’il voyait de loin. Cette jeune fille insolente qui ne se laissait pas faire ou alors qui se cachait dans les cuisines pour fuir ces mondanités.

« J’ai envie de dire, vous n’avez pas vraiment changé, finalement. Toujours cette personne qui n’aime pas les mondanités et qui se cache pour les fuir quand elle est obligée d’être là. »

Et Erwan se rendit compte qu’il était pareil. Lui aussi s’était caché dans cet endroit, à même pas une minute de rejoindre la soirée, prêt à courir sourire au monde au moins appel au talkie. Erwan sourit à Penny, ne perdant pas sa bonne humeur jusqu’à la réponse de Penny.

« Je l'ai acheté aujourd'hui... Mais j'y ai rajouté ma petite touche. C'est important pour moi de les avoir sur moi... quoi qu'il arrive! »

Erwan regarde les médailles avec attention. Elles ont effectivement une forte signification, même pour lui qui n’était pas particulièrement calé en militaire. Il avait envie de poser des questions mais il n’osait pas vraiment. Il ne savait pas quoi demander de toute façon, il connaissait les grandes lignes de la version officielle.

« Le costume vous va à ravir aussi! Votre femme ne sait pas ce qu'elle rate!

_Oh ! Euh... Merci. »

Erwan rit un peu jaune. En effet, c’était très sucré salé comme réplique. D’abord un compliment qui lui donnait envie de sauter comme un cabri, d’autant que la proximité avec Penny le rendait nerveux, puis un simple commentaire qui le minait complètement. Sa femme, Sydney. Elle n’était pas là aujourd’hui, heureusement. Elle se faisait porter pâle, comme d’habitude ces derniers temps. Elle devait sûrement aller chercher de la chaleur humaine ailleurs, étant donné que Josh refusait désormais d’être le dindon de la face.

Erwan était vraiment amer avec cette histoire. Il avait des principes moraux, avait toujours respecté ses vœux de mariage, même s’il n’y avait pas vraiment lieu de les respecter. Après tout Sydney ne se gênait pas. Il se demandait même qui était au courant pour cette histoire extra-conjugale... Il se demandait combien d’entre eux le prenaient pour un con, parmi ceux qui l’avaient salué et congratulé durant la soirée.


Il se redressa et s’assit à côté de Penny. Pris d’une impulsion, il attrapa son téléphone et tomba sur le SMS qu’il avait préparé mais jamais envoyé. Il y avait même un éclat sur le haut de son écran car il l’avait fait tomber quand Brooke, lors d’un repas entre amis, avait tenté de le lire. Toujours de la même impulsion, il finit par l’envoyer. Histoire que Penny aie à nouveau un petit sourire sur les lèvres. Il avait terni un peu lors de l’évocation des médailles. Au moins, quand celui-ci se moquait d’Erwan, il n’avait pas l’air trop triste.

Puis, regrettant presque, il s’agita deux secondes. Puis se calma.

« Voilà. Finalement, je l’ai envoyé, ce fameux texto. Comme ça, vous ne m’aurez pas donné votre numéro pour rien. »

Auprès de lui tu ne peux l'expliquer, mais tu te sens bien. Apaisé. Elle n'est pas comparable à cette sensation que tu ressentais lorsque tu étais avec Quincy. Tu ne veux pas les comparer, ni les opposer. Ce sont deux personnes différentes, deux histoires, bien que celle avec Erwan n'a pas encore commencé... et encore tu es bien optimiste. Tu ne sais même pas si c'est vraiment ce que tu désires. C'est un homme qui t'attires c'est indéniable. Le voir allongé auprès de toi te donne envie de te relâcher et de faire de même et pourtant tu restes dans cette fausse posture décontracte. Attends un je ne sais quoi, une permission, qui n'arrive pas ! .. Parce qu'au fond tu sais pertinemment que cela ne peut venir que de toi au vu des messages qu'Erwan essaye de te faire passer ! "Vous m'observez depuis quand ? Dit donc Erwan? Serais-je par hasard une obsession?" dis-tu avant de ressortir ce sourire taquin, qui se transforme très vite en sourire sincère puis gêné. être le centre de l'attention, tu as toujours voulu l'éviter et tu as toujours réussi à le devenir malgré toi... de par tes prises de décisions qui ne concernait finalement que ta personne... enfin tu le croyais. Tu n'aimes pas réaliser, te sentir observer... Alors tu préfères riposter en évoquant sa femme alors qu'au fond de toi, tu te doutes que votre relation va bien au-delà qu'une connaissance de boulot. Une attirance, présente et amplifiante depuis vos retrouvailles.  

Erwan prend son temps avant de bouger, de changer de position et de s'asseoir à tes côtés. Surpris tu le regarde du coin de l'oeil. Il sort son portable, commence à taper frénétiquement sur son écran. Une sonnerie interrompt ce silence installé par vos soins. Tu sors alors ton portable et Erwan te précises alors que tu n'auras rien à lui reprocher! "Je suis content de vous voir... sans l'auteur!" dis-tu avant de replacer une mèche rebelle. Tu n'as pas mis assez de gel. Tu es un rebelle...enfin c'st ce que tu t'obstines à te dire alors que tu as passé la trentaine. "Erwan..." dis-tu dans un ton plus sérieux. "Vous me plaisez!" dis-tu en sachant pertinemment que dans cette phrase une ambiguïté peut s'en dégager. Tu espères du moins qu'elle se fait ressentir! Tu n'as pas peur de l'écherc tu n'as peur qu'il te dise non... certainement parce que tu as cette impression que tu as le dessus... tu te doutes qu'il peut de nouveau te surprendre et se sentir offusqué ! Mais encore une fois une part de toi se dit que c'est le jeu et qu'importe si tu perd tout... tu n'as finalement plus grand chose à quoi te raccrocher ! "Alors je me doute... vous êtes marié et c'est compliqué... oh je connais ça! mais j'ai perdu beaucoup de choses et je me dis que si je ne vous le dis pas maintenant... je ne le dirais jamais... car je ne supporterais pas une nouvelle soirée de la sorte ! Sauf si c'est pour accompagner un homme comme vous... comme toi!"

Erwan avait presque envie de filer dans un trou de souris. C'était ce sourire taquin qui l'achevait, c'en était fini pour lui, mort pour son pays ! Une fois proche de lui, après avoir envoyé le texto, il fut néanmoins totalement surpris. La réponse verbale le fit même rougir à en surchauffer.

"Je suis content de vous voir... sans l'auteur!

_Oh! Dommage pour lui. Tant mieux pour moi."

C'était sûrement de le voir ainsi, avec ses cheveux qui voulaient se libérer, qui donnait à Erwan de se libérer aussi. Penny était un homme, cela perturbait certes l'éditeur mais pas plus que cela. Après tout, certes il était attiré par les femmes, mais en réalité il ne s'était jamais posé de questions. Il avait suivi l'éducation de son père, s'était fermé avec des oeillères. Avait-il déjà désiré un homme avant ? Aucune idée. Peut-être bien que c'était la première fois. Mais là aussi il ne se posait pas de questions, ce serait parasiter cette relation naissante. Il sentait au fond de ses tripes que ce qu'il ressentait était vrai, il voulait garder cette authenticité. Pourtant, ils se voyaient pour la deuxième fois ?

"Erwan..."

Le ton sérieux de Penny fit perdre presque instantannément le sourire d'Erwan. Il se demandait ce qu'il avait fait. Ou dit. Il se figea, resta silencieux. C'était horrible d'attendre ce qui suivait, les secondes étaient longues comme des siècles.

"Vous me plaisez!"

*Je lui plais ?! Moi ? Je lui plais ? Dans quel sens ? Il me trouve drôle ? Il me veut ? Comment ? Comment c'est possible ? Tu es ridicule, Erwan, arrête de croire au Père Noël.*

L'estomac d'Erwan devait être facilement tombé dans ses talons. Cette simple phrase lui avait carrément vidé la tête. S'il était honnête avec lui, il se dirait que c'était forcément la même chose chez Penny que chez Erwan. Qu'ils se cherchaient, simplement. Mais son manque de confiance en lui-même l'avait envahi de la tête aux pieds. Cela n'avait pas l'air d'une blague, Penny était mortellement sérieux. Exit le mariage pourri, exit Sydney et ses infidélités, exit tout. Pour ces paroles, pour ce regard, pour le sourire taquin de Penny, il serait capable de tout.

"Alors je me doute... vous êtes marié et c'est compliqué... oh je connais ça! mais j'ai perdu beaucoup de choses et je me dis que si je ne vous le dis pas maintenant... je ne le dirais jamais... car je ne supporterais pas une nouvelle soirée de la sorte ! Sauf si c'est pour accompagner un homme comme vous... comme toi!"

*Peut-être bien que je vais croire au Père Noël finalement...*

Erwan ouvrit sa bouche pour répondre, mais ne pouvait plus bouger, comme coincé quelque part, mal huilé, une pièce manquante. Il ne devait pas s'emballer... S'il s'écoutait, il prendrait Penny dans sa voiture, irait réveiller un juge pour divorcer tout de suite... Il y avait même des juges juste à côté ! Dans la réception !

*Mais non, Erwan, tu es un adulte, tu peux te retenir, tu es un homme...*

Il devait se calmer, il était capable de raison. Par contre, il y avait des choses qu'il pouvait faire, afin de s'assurer que ce rêve était réalité. Il leva sa main, doucement, sans répondre tout de suite, et posa ses doigts sur la joue de Penny. Il se promena en rond, doucement, sentant les tout petits poils rasés probablement au matin sur la joue, les petites rides de la commissure des lèvres, la douceur de cette chair rosée. C'en était presque trop facile. Cela le fit légèrement rire.

Pris d'une envie qui ne relevait même pas d'une pulsion, il approcha son visage de celui de Penny. C'était une simple envie, qui lui avait traversé la tête et à laquelle son coeur lui avait dit oui. Il ne se sentait pas stressé, rien, juste, il avait envie. Et il se sentait autorisé par Penny. C'était tellement facile de céder ! Il ne savait pas de quoi était fait demain, alors il céda.

Il approcha son visage tranquillement, pas pressé pour un sou. Cela allait déjà vite, il n'allait pas non plus se presser. Et puis Penny n'allait proablement pas le repousser, n'est-ce pas ? Pas après des mots pareils. Pas après... Ce regard.

"Krgrrrkrkrrrrr. Poste de sécurité à Monsieur Cent fils ?"

Erwan s'arrêta purement et simplement, sans s'éloigner. C'était le talkie walkie qui venait de grésiller. Bon. Il avait pas bougé, pas parlé, pendant tout le temps qu'ils étaient dehors, mais il fallait qu'il agisse maintenant. Erwan soupira, mais toujours sans éloigner son visage de Penny, il rapprocha le talkie et parla.

"Cent fils à Poste de sécurité. Quoi ?

_Monsieur Cent père vous demande à l'estrade."

Erwan ne voulut même pas répondre, il reposa son talkie puis planta ses yeux dans ceux de Penny. Il s'y plongea, puis finalement, se moquait bien du reste. Il l'embrassa, d'un coup. Quelque part, bien caché au fond de lui, il y à une partie de lui, une partie qui hurlait de joie. Mais le vrai Erwan, celui qui avait posé ses lèvres sur celle de Penny, restait calme. Il pourrait s'en inquiéter, s'il ne s'en moquait pas totalement.

Pas d'explosion, pas de papillons - non, c'était un volcan en éruption et des dragons, messieurs dames. S'il se contentait de savourer tranquillement, à l'intérieur, c'était Woodstock, la guerre de Sécession et même les Black Panthers. Le Big Bang originel qui redonna la vie à Erwan, l'étincelle devenue grande. Mais il était calme.

Au bout d'un moment, Erwan se retira, ferma les yeux, soupira, puis il eut un petit rire dépité. Il commença alors à parler pour la première fois depuis la déclaration de Penny.

"Moi aussi. Si je ne le faisais pas maintenant, je ne l'aurais probablement jamais fait."

Il se recula, retira sa main de la joue de Penny, puis se releva. Il épousseta rapidement son costume. Bon, ça ira, il avait eu le temps de sécher un peu, et puis au pire, il s'en moquait totalement. Il avait embrassé Penny, la soirée pouvait s'arrêter, il était heureux.

"Je suis désolé, le devoir m'appelle. Est-ce que je vous rappelle ? Ou non, plutôt, je vais te rappeler. N'est-ce pas ?"

Erwan lui sourit, puis il soupira encore. Décidemment, son père n'avait pas fini de le couper dans son élan. Tant pis. Mais quelque part, c'était mieux, il ne devait pas faire de bêtise. Il était marié, et il voulait régler ce qui n'allait pas avant d'aller plus loin. C'était bien beau d'être attaché à qelqu'un, il fallait aussi faire les choses bien. Pas comme Sydney.

Erwan fit finalement demi-tour, un sourire rêveur sur les lèvres, prêt à affronter son père et les invités pour le reste de la soirée. La sienne était faite.

Oui c'est vrai. Tu pensais toutefois que ta petite déclaration allait avoir de l'effet. Tu pensais recevoir une réaction de la part d'Erwan et tu savais qu'elle allait plutôt pencher dans le positif plutôt que le négatif. Dans cette histoire il n'est pas question de manipulation juste d'instinct fortement prononcé. Soit Erwan allait sortir du placard, soit il allait fuir comme il avait pu le faire lors de votre dernière et première rencontre... Apparemment il a choisi la première option. Du moins il s'y approche de manière physique. La distance entre vous se réduit de plus en plus. Un sourire se dessine sur ton visage et tu attends qu'Erwan fasse le premier pas, pour ne pas trop le brusquer... mais le talkie de monsieur vient interrompre ce moment et alors que tu t'attends que ce moment s'éloigne aussi vite qu'il est apparu, Erwan te surprends en t'embrassant. Avoir ses lèvres sur les tiennes ravivent un sentiment que tu pensais éteins. Cette excitation, cela faisait longtemps que tu ne l'avais pas ressenti. Pour une fois tu ne penses pas à Quincy. Tes pensées s'arrêtent à ce moment précis. A cet agréable moment où un sentiment de plénitude t'emplis. Tu attrapes son visage et profite encore un peu de cette embrassade avant qu'il ne se retire. Tu le vois alors s'activer et se lever prêt à affronter cette foule. Tu es de nouveau surpris par cette énergie soudaine. Amusé tu le regardes se tortiller. Bégayer par rapport au fait qu'il te rappeler. "J'attends alors... cette fois-ci j'attends!" dis-tu avant de le voir repartir vers la lumière de la mondanité. Tu l'observes au loin repartir avant de ressortir les deux médailles présentes dans ta poche de costume. Tu les poses au sol, juste devant toi et réfléchis à ce que tu as fait. Ce que tu vas faire et où tout cela va t'amener.